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Le conte philosophique

Le conte philosophique est un genre narratif qui apparaît au 18e siècle, en réponse à la censure que subissent les philosophes. L’imaginaire permet l’approche de la condition humaine ou de la société par un moyen détourné et moins subversif en utilisant un monde imaginaire et des personnages fictifs. L’auteur à qui l’on doit l’émergence du genre est incontestablement Voltaire.
 

Doc. 1 : Portrait de Voltaire 17 e siècle


 

1. Définition du conte philosophique

Le conte philosophique appartient au genre narratif. Sa détermination paraît contradictoire puisque les termes évoquent deux réalités opposées : le récit imaginaire et la réflexion philosophique.

• Il a en commun avec le conte traditionnel
sa structure narrative : qui suit le schéma narratif traditionnel avec plus ou moins de liberté dans le traitement chronologique du déroulement de l’intrigue (La situation initiale, l’élément perturbateur, les péripéties, l’élément réparateur, la situation finale).

son contenu imaginaire : qui introduit le lecteur dans un univers fictif. De fait, il utilise les mêmes formules d’entrée que les contes traditionnels : « Il était une fois / Au temps de … / Il y avait... ».

• Il a en commun avec le but philosophique des Lumières
L’esprit satirique du combat : il s’agit de critiquer la société et montrer son dysfonctionnement au sujet des hommes et de leur comportement (leurs mœurs, leurs relations) ; au sujet du pouvoir en place (abus de pouvoirs et inégalités) ; au sujet des autorités religieuses et toute marque d’intolérance.

La réflexion sur la vie, la rencontre entre la conscience, la raison et le monde : L’imaginaire permet une réflexion sur l’homme, les aspects de la condition humaine. Les concepts abordés relèvent d’une réflexion philosophique.

La morale, comme dans l’apologue : Les récits aboutissent à une leçon d’humilité envers Dieu ou l’univers et à l'acceptation de sa propre condition. Elle montre le danger de tout fanatisme ou tout abus de pouvoir.

2. L'univers du conte philosophique

• Qui ?
Les personnages sont des êtres fictifs, de papier : des héros d’apprentissage qui se forment au fil des épreuves rencontrées.

Exemple :
Candide, le personnage éponyme (qui donne son nom au titre de l’œuvre) n’est pas un personnage de chair : Voltaire ne nous le décrit pas physiquement ; on sait seulement qu’il « avait le jugement assez droit, avec l’esprit le plus simple, c’est, je crois, pour cette raison qu’on le nommait Candide » (chapitre 1). Son nom suggère son innocence et la pureté d’une attitude sans défiance mais c’est un personnage qui est voué par nature à évoluer. Son voyage va lui permettre de découvrir les réalités les plus cruelles du monde, mais aussi de conquérir son autonomie et de découvrir une certaine forme de sagesse.

• Où ?
Le lieu est imaginaire ou lointain.

Exemple :
Le tout début de Zadig commence dans l’atmosphère des Mille et une nuits. « Au temps du roi Moabdar, il y avait à Babylone un jeune homme nommé Zadig. » : les noms orientaux et l’indication de lieu « Babylone » à savoir le nom sumérien d’une ville antique de la Mésopotamie (aujourd'hui l'Irak) introduisent une distance fictive. Le conte oriental permet de mettre en œuvre la philosophie de Voltaire dont la cible est son siècle, mais sans être atteint par la censure.

• Quand ?
Le récit s’ancre dans un univers sans contact avec le réel de Voltaire en apparence mais les liens et les rapprochements sont implicites.

Exemple : 
Micromégas
 est un conte qui inaugure la science-fiction. Le personnage évolue à travers les espaces intersidéraux, avec un respect mathématique des données. Le personnage à la taille démesurée et presque immortel relate ses voyages en exposant son rapport sur le genre humain et développant une philosophie qui est celle de l’auteur sur le relativisme physique et moral qui définit le bonheur comme un équilibre entre le désir et la nature.

• Quoi ?
Le thème primordial est l’imperfection des hommes et l’omniprésence du mal, duquel il convient de se préserver par une forme de sagesse. Le conte est une suite d’aventures mouvementées qui se succèdent à une allure infernale et improbable. L’histoire est un prétexte à instruire et opter pour une réflexion philosophique.

Exemple :
L’épître dédicatoire de Zadig constitue un avertissement au lecteur de la dimension philosophique du récit. Voltaire définit son conte comme « moral, philosophique, digne de plaire à ceux qui haïssent les romans » ; « un ouvrage qui dit plus qu’il ne semble dire ».

3. La fonction du conte philosophique

Le conte participe de la philosophie : l’auteur y livre sa pensée philosophique sous le couvert du récit et condamne les différents maux qui touchent le monde : le fanatisme, l’intolérance, la guerre et l’esclavage.

Exemple : 
Les positions philosophiques de Candide
- Voltaire lutte contre l’optimisme de Leibniz. Le sous-titre « ou l’optimisme » souligne l’enjeu du conte : la dénonciation la théorie du « tout est bien dans le meilleur des mondes» défendue par le philosophe et mathématicien allemand. Pour lui cette « rage de soutenir que tout est bien quand on est mal » est une aberration au vu du tremblement de terre de Lisbonne ou de la guerre de Sept Ans, des crimes des fanatiques et de l'intolérance.

- Il s’insurge contre le fanatisme et l'intolérance religieuse. La critique de l’église passe surtout par une satire du monde ecclésiastique.

- En confrontant le héros de loin ou de près à l’horreur de la guerre, il stigmatise l’absurdité de la guerre, la cruauté de l’homme envers son semblable : le triomphe de l’inhumanité.

- Voltaire dénonce l'esclavage à plusieurs reprises dans son conte. L’aliénation de l’homme par l’homme lui dicte des passages terribles qui montrent l’horreur de la condition des esclaves et l’inhumanité des responsables de ce commerce, les sociétés occidentales.

Candide répond ainsi à la définition de l’apologue : c’est un récit, une narration, une fiction qui comporte une leçon, mais cette leçon n’est pas seulement morale elle invite à une réflexion sur le monde et sur l’homme. Le dernier chapitre s’intitule « conclusion » parce qu’elle livre une leçon finale qui invite à se taire, taire toute philosophie pour privilégier le travail et la simplicité de la vie.

L'essentiel

Le conte philosophique s’apparente au récit et à la philosophie dans le sens où derrière l’apparence d’un récit léger, souffle l’esprit des Lumières : on retrouve tous les thèmes critiques chers aux philosophes du 18e siècle.

Source Maxicours

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